Soyons SELidaire…

http://selidaire.org/spip/article.php3?id_article=784

par Nicolas Hubé

Créée au mois de mai, l’association SEL Solidarité Meinau entend développer les rapports humains sur une base non monétaire.

Les projets du SEL (système d’échange local) dépassent largement le seul cadre d’une association. Venue du Canada et du Royaume-Uni en passant par l’Allemagne et l’Autriche, l’idée de la solidarité par l’échange de services a fini par s’implanter en Alsace en 1995, à Lutterbach d’abord, puis à Strasbourg, dans un petit local de la rue de Touraine à la Meinau.

UTOPISTE MAIS HUMAIN

Cette structure, qui refuse toute allégeance à quel que parti politique, église ou secte que ce soit, s’inscrit dans un vaste mouvement de réflexion critique sur le système marchand. « Pour sortir de la crise actuelle qui perdure et s’amplifie depuis des décennies, il fallait être capable d’innover au point de remettre en cause jusqu’à nos habitudes économiques », consent Saïd Omidi, président de SEL solidarité Meinau. En effet, cet habitant de la Meinau considère que le système actuel ne fait que creuser des écarts par la perversion de l’argent. « L’homme est aujourd’hui réduit à un revenu, qui détermine son existence. Il n’y a plus de rapports humains. » Partant de ce constat, l’esprit du SEL est né qui vise à introduire des contacts amicaux, et non plus monétaires, dans la vie de tous les jours. L’usage d’un service, l’achat ou la location d’un bien passent désormais par le troc et l’honnêteté entre les membres de l’association. S’inscrivant dans l’idéal du socialisme utopique de Saint-Simon, Fourrier et Proudhon, « il ne s’agit toutefois pas d’une alternative au capitalisme mais d’une amélioration des rapports sociaux. » SEL ne cherche pas à contrôler les faits et gestes de ses adhérents, auquel cas on parlerait de secte, mais fonctionne sur le volontariat et l’échange.

OFFRES ET DEMANDES

Concrètement, le fonctionnement de cette organisation est très simple. « Le point de départ consiste à raisonner en grains de sel, qui est une unité de mesure calculée sur la base temps (60 grains équivalent à 1 heure de travail fourni), non convertible en francs. Elle régule nos échanges. » Chaque membre du SEL au moment de son adhésion émet ses demandes et ses offres de biens et services enregistrées sur un catalogue accessible à tous. « Une même personne peut avoir besoin d’un cours d’informatique et d’une nouvelle coupe de cheveux, et proposer de prêter son appareil photo et de faire la cuisine pour un mariage. » Réunis toutes les semaines à la Meinau, les adhérents effectuent leurs échanges de gré à gré, selon leurs envies et leurs capacités, sans aucune obligation. « La seule condition est d’être ouvert aux autres, c’est-à-dire de faire en sorte que son capital-grains de sel soit nul. » Si décompte des grains de SEL il y a, ce n’est en fait que pour assurer un équilibre et une équité entre les adhérents. En clair, c’est une façon bien concrète d’utiliser son temps disponible à des activités agréables et utiles, tout en faisant des économies. Saïd Omidi estime à 1 % du revenu annuel les économies réalisées. Il est à noter que cette structure brasse des gens de tous les horizons socioculturels et que le dialogue de chacun avec chacun est la base d’un bon fonctionnement. Mais un tel projet n’est pas à l’abri de complications juridiques, comme le SEL d’Ariège contre lequel a été intenté un procès pour travail clandestin. L’activité n’étant pas salariée, le tribunal d’appel a légitimé l’existence du SEL. SEL Solidarité Meinau ayant depuis 6 mois une base de 35 à 40 membres, il compte maintenant s’implanter plus ouvertement à Strasbourg pour apporter quelques grammes de finesse dans un monde de bruts !

liste des  SEL en France   http://selidaire.org/spip/article.php3?id_article=903